Pourquoi la Jeunesse sud-coréenne se suicide tant ?

En Corée du Sud, l’excellence à l’école est une question de vie ou de mort. Selon une étude du PISA (Programme International pour le Suivi des Acquis des élèves) ce pays est le plus performant de l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Economique). La Corée du Sud, est donc le pays qui a obtenu le score moyen le plus élevé aux épreuves de mathématiques des cycles de PISA ces dernières années. Mais derrière cette prouesse hors du commun des élèves et étudiants sud-coréens, se cachent une réalité macabre : le suicide. Pourquoi la Jeunesse sud-coréenne se suicide tant ?

Après la guerre civile de 1950-1953, la Corée est déchirée. Le pays se divise en deux États, la République de Corée (Corée du Sud) et la République populaire démocratique de Corée (Corée du Nord). Les frères ennemis se vouent une haine viscérale, exacerbée par la rivalité entre les États-Unis et l’Union Soviétique. Pendant que la Corée du Nord de Kim Il-song opte pour une forme politico-économique rigide et fermée, son voisin du sud, conduit par Syngman Rhee, est plus ouvert au monde. Rapidement la Corée du Sud, avec l’aide de son puissant allié Américain, devient une superpuissance industrielle et technologique. La main-d’œuvre sud-coréenne est l’une des plus qualifiées du monde et cela est dû à son système d’éducation applaudi par certains pour son efficacité et désapprouvé par d’autres pour sa rigidité.

Outre son bond spectaculaire parmi les nations les plus puissantes, la Corée du Sud se fait aussi remarquer par son fort taux de suicide.

40 tentatives de suicide par jour

En plus d’être le pays où l’on travaille le plus dans toute l’OCDE, la Corée du Sud détenait déjà en 2012 le triste record de suicides avec une moyenne de 29,1 cas pour 100 000 habitants. Épargné jusqu’à un passé récent, le fléau touche aujourd’hui à grande échelle la Jeunesse. En effet, ce sont en moyenne 40 jeunes élèves et étudiants sud-coréens qui tentent de se donner la mort chaque jour et le nombre de suicides va croissant au fil des années. « Le suicide des jeunes est devenu un problème social dont la prévention nécessite des mesures systématiques et ambitieuses. », a plaidé le ministère de l’Éducation et de la Technologie sud-coréen dans un communiqué.  

Selon un constat, les suicides se multiplient surtout à l’approche des concours d’entrée à l’université. C’est clair, dans la patrie de Samsung et de Hyundai, la pression de la concurrence est impressionnante sur les bancs. On n’a pas droit à l’échec, on craint d’être la honte de la famille et de sa communauté. Mieux vaut mourir que d’échouer à un examen. Les chiffres du ministère de l’Éducation et de la Technologie sud-coréen sont effarants et alarmants, 878 écoliers se sont donné la mort entre 2009 et 2014. Le fléau est d’autant plus qu’inquiétant qu’une étude menée par la Fondation coréenne pour la promotion de la santé, révèle que plus de la moitié des adolescents sud-coréens âgés de 14 à 19 ans ont pensé au moins une fois au suicide.

Un pays aux systèmes éducatifs rigoureux

En Corée du Sud, l’école est une sorte d’arène dans laquelle il faut absolument remporter la victoire. La compétition entre élèves et étudiants est plus que féroce.

Champions dans presque toutes les compétitions internationales de quotient intellectuel dans lesquelles ils sont engagés, les élèves et étudiants sud-coréens accordent 50 heures de leur temps hebdomadaire aux études. C’est chose rare d’y voir un élève ou un étudiant dormir avant 21h. C’est d’ailleurs à cette heure que la plupart d’entre eux se rendent dans les hagwons, ces sortes de centres privés de formation où des professeurs, chèrement payés, les préparent aux différents examens jusqu’à très tard dans la nuit. Le monde appartient à celui qui se couche tard. Les sud-coréens ont fait de cette phrase presqu’une devise et ne dorment en moyenne que pendant 5 heures les nuits. Fait stupéfiant, la mairie de Séoul a même imposé un couvre-feu à 22h pour astreindre les élèves aux études. Cette mesure est certes peu respectée, mais elle dénote de la rigidité du système éducatif de ce pays.

Par ailleurs, le recours aux châtiments corporels pour punir un élève qui n’aurait pas effectué un devoir de maison ou qui se serait absenté à un cours, est très souvent utilisé dans les écoles. De véritables ‘’tortures’’ sont dénoncées depuis de nombreuses années. Mais ce sont des ‘’tortures’’ essentielles pour l’avenir du pays pense-t-on. En Corée du Sud, il n’est pas étonnant de voir un élève de la maternelle tenir un gros livre sur la tête, agenouillé et ce durant plusieurs heures. Les gifles, les coups de cannes, etc. sont denrées courantes dans les écoles sud-coréennes et les parents sont ceux-là mêmes qui incitent les maîtres et professeurs à y mettre plus d’agressivités.

Résultat d’une pression insoutenable

Avec ce système de ‘’réussite forcée’’, la jeunesse sud-coréenne n’a pas suffisamment le temps de s’épanouir. Les enfants sont 7j/7 sous-pressions et il n’y a personne pour les écouter et leur offrir le répit dont ils ont tant besoin. En grandissant, la peur de l’échec social mène la Jeunesse sud-coréenne vers la dépression. L’envie de se vider et de se défaire de tous ces regards exigeants se faire de plus en plus ressentir et se donner la mort est malheureusement la seule solution.

La Corée du Sud est le 13ème pays le plus développé au monde et l’un des plus connectés qui soient. Cette ascension fulgurante connue ces 30 dernières années, elle la doit à sa population réputée pour son acharnement au travail et son patriotisme sans failles. Le pays du Matin calme ne compte pas s’arrêter en si bon chemin et vise un classement plus honorable, sa Jeunesse est la carte maîtresse sur laquelle il faut miser et il ne faut pas lésiner sur les ‘’moyens’’.

Mais à y voir de plus près, cette méthode ne pourrait-elle pas devenir la cause future d’un déclin ?

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About Yannick DJANHOUN

Yannick DJANHOUN, aussi appelé Mister Colombo, est un Journaliste ivoirien. Actuellement Rédacteur en Chef de Tomorrow Magazine, Yannick est un passionné de la Jeunesse Africaine. Sa plume, il l'a met au service de la promotion du Leadership de celle-ci.

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