Stéphanie ASSI, l’Étoile du Digital en Afrique

Stéphanie ASSI

L’Afrique, notre continent, a autant besoin de cracks que de passionnés pour affronter les obstacles et pour relever les nombreux défis de son développement. Que ce soit dans le secteur de l’agriculture, de l’énergie, des médias, des technologies que dans l’éducation, l’innovation, le savoir-faire et la probité sont des valeurs dont on a besoin. L’Afrique compte sur tous ces Jeunes qui, à travers le continent, se construisent, bâtissent, réfléchissent. Stéphanie ASSI réfléchit à l’Afrique de demain. Amoureuse des codes informatiques, elle apporte sa pierre à l’édifice.

Vous devez le savoir, chaque mois, plusieurs lecteurs du mensuel de la Jeunesse africaine, nous font des recommandations de potentiels candidats pour figurer sur notre couverture. La rédaction de Tomorrow Magazine prend alors soin d’apprécier le profil de chaque Jeune Leader proposé et juge de la pertinence de les mettre en avant. Nous découvrons le profil de Stéphanie ASSI, notre étoile d’aujourd’hui, grâce à Noely N’GUESSAN, un fidèle lecteur. Nous sommes mis en contact avec la Jeune dame avec qui nous sommes tout de suite à l’aise. Stéphanie, sans complication, nous présente ses ambitions et ses aspirations. Nous sommes convaincus que son histoire, son parcours inspirera plus d’un.

Montrer l’exemple, un impératif

Stéphanie naît la première dans une famille qui compte plusieurs enfants. Son père est son coach, sa mère est également son coach. Vous avez bien lu. Elle a à elle seule deux coaches. Tout se justifie donc. Le premier l’oriente sur le plan professionnel et le deuxième lui apprend à apprendre la vie. De ses parents, Stéphanie reconnaît avoir reçu ce qui a contribué à faire d’elle la dame qu’elle est aujourd’hui : « J’ai beaucoup appris de mes parents sur la valeur du travail bien fait, la détermination et surtout le sens du sacrifice. » Nous a-t-elle confié. Comme si c’était hier, Stéphanie se souvient que son père, pour inciter ses enfants à mieux travailler à l’école, les invitait dans de grands restaurants, lorsqu’ils avaient de bonnes moyennes. « Ce geste nous a tellement impacté, qu’on s’efforçait de bien travailler en classe pour ne pas rater notre grosse glace. » Nous raconte-t- elle avec le sourire.

Un fait a marqué son enfance et est devenu l’une des raisons pour lesquelles elle se bat aujourd’hui. À cause de certaines difficultés financières que rencontrait la famille, les anniversaires passaient inaperçus. À ses 10 ans, rien n’était prévu pour la petite Stéphanie et cela l’avait fortement attristée. Sa mère l’ayant remarqué s’est promise de lui faire une belle surprise l’année d’après. Elle a tenu sa parole : « Ma mère est une femme battante, elle a mis tout en œuvre pour que j’ai un large sourire pour mon 11ème anniversaire et ce, malgré́ les difficultés que nous traversions dans le temps. » L’adolescente a été invitée par sa mère à un dîner au Sofitel Hôtel Ivoire, le plus grand établissement hôtelier de la Côte d’Ivoire. « Ce grand geste de maman a immortalisé mes 11 ans dans mon esprit. » Sa position d’aînée l’a aidé à vite comprendre qu’elle devait faire les choses correctement. Il faut savoir donner l’exemple aux petits frères. C’est une grande et belle responsabilité́, mais qui comporte aussi une certaine pression : « Étant l’aînée, j’ai beaucoup de pression parce que mes frères ont un regard admiratif de moi, ce qui fait que je n’ai pas droit à l’erreur. » Pression, oui, mais cela l’a certainement aidé lorsqu’elle a dû gérer des projets d’envergure dans les grandes entreprises où elle a travaillé.

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Petite fille, Stéphanie vacillait entre la finance et le journalisme. Son père avait un profil de scientifique et sa mère celui de littéraire. La bataille était rude. Toutefois, un sentiment s’était saisi de son cœur : le désir d’être indépendante. « À mon jeune âge déjà, je comprenais parfaitement la notion d’indépendance financière, parce que j’avais vu des femmes perdre tout du jour au lendemain, simplement parce que leurs époux s’en étaient allés. Je n’arrivais pas à comprendre pourquoi est-ce que des femmes si intelligentes ne voulaient pas avoir leurs propres activités pour se détacher financièrement en cas de nécessité. » Ça promettait pour l’avenir.

African Dream

Ah les États-Unis ! Stéphanie en rêvait. Déjà au lycée, elle s’était promise d’y aller pour perfectionner son savoir-faire. C’est une fille studieuse que les professeurs du Lycée Sainte-Marie d’Abidjan appréciaient. Mais, un événement brutal apparaît subitement. Stéphanie contracte une grossesse. C’est la panique chez ses parents. Cette panique laisse vite place à la déception. Comment leur si belle et intelligente petite fille a pu ‘’tomber aussi bas’’ ? Qu’est-ce qui lui manquait. Pour ses parents, c’était certainement la fin ou du moins une atteinte sérieuse à l’avenir de leur fille. Stéphanie par contre développait une autre attitude : « Pour moi, c’était plutôt un challenge de faire en sorte que cette épreuve ne mette pas fin à mes rêves. J’ai puisé de toutes mes forces pour terminer ma dernière année sans interruption. » Assez impressionnant pour une si Jeune fille. Aujourd’hui son fils est sa plus grande fierté. Son amour pour lui a maintenu en éveil le feu de la réussite qui brûlait déjà en elle. Son leitmotiv aujourd’hui est qu’il soit fier d’elle.

Après l’obtention de son baccalauréat, Stéphanie voulait relever le défi d’aller toute seule poursuivre ses études au pays de l’oncle Sam et de revenir ensuite se mettre au service de son pays. À cette époque, très peu de personnes de son entourage arrivaient à s’en sortir à l’étranger, surtout aux États-Unis, premièrement à cause de la barrière linguistique, ensuite à cause de la différence du système éducatif et enfin à cause du coût extrêmement élevé des études. Soutenue moralement et financièrement par ses parents, Stéphanie réussit à s’inviter dans une Université américaine.

Elle s’y inscrit en sciences économiques parce que son objectif était de finir à la Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO). Cependant, après un semestre de formation en micro et en macro économie, elle conclut tout de suite qu’elle n’y sera pas épanouie. Elle s’inscrit ensuite en faculté des mathématiques et statistiques appliquées. Éblouie par tout ce qu’elle y apprend, Stéphanie se laisse convaincre qu’elle vient de découvrir sa passion. Elle ne lâche pas d’une semelle ses professeurs. Elle se montre très curieuse et passe beaucoup de temps auprès de ses professeurs pour en savoir plus et discuter des sujets abordés en classe. Percevant de très belles dispositions de programmeuse chez elle et voyant son amour pour les chiffres et la logique, son conseiller académique lui propose de faire des études en ingénierie informatique, option génie logiciel. Elle s’y met volontiers.

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Son diplôme en main, elle est courtisée par de grandes firmes technologiques américaines dans lesquelles elle va faire ses preuves pendant de 10 ans.

Pour elle, c’est maintenant le temps de rentrer en Afrique pour développer toutes l’expérience et le savoir-faire appris chez la première puissance mondiale : « Après toutes ces années passées en Occident, j’ai décidé de tourner le regard vers ma terre natale et de me lancer dans l’entrepreneuriat, en particulier dans le domaine des FinTech (réinventer le secteur financier à l’aide des nouvelles technologies). Aujourd’hui je suis co-fondatrice et Directrice de Technologie (Chief Technology Officer) à Moja Ride, une start-up ivoirienne. »

Entrepreneure au nom de l’Afrique

L’entrepreneuriat a toujours coulé dans les veines de notre étoile. Au lycée, Stéphanie ASSI commercialisait des friandises (bonbons, caramels, chocolats, etc.) aux élèves de sa promotion. Aux États-Unis, pendant ses années estudiantines, elle ouvre une boutique en ligne de vente de mèches et produits de beauté, qui tourne pendant 2 ans environ. Elle lance par la suite sa compagnie de services de traductions de documents officiels anglais – français et vice-versa. L’argent qu’elle y gagne lui permet de subvenir à ses besoins personnels, à ceux de son fils et d’aider autant qu’elle le peut, sa famille en Côte d’Ivoire.

Mais si Stéphanie ASSI se lance résolument dans l’entrepreneuriat, c’est bien pour ce qu’elle dira dans les lignes suivantes : « J’ai longtemps été préoccupée par le retard de l’Afrique sur le domaine numérique et technologique. Cela ralentit considérablement et dangereusement le développement de nos nations. C’est alors pour essayer de résoudre ces problèmes que j’ai décidé d’entreprendre dans le secteur des TIC. »

Essayer de résoudre des problèmes ? Stéphanie, lorsqu’elle a l’occasion de revenir au bercail, analyse les conditions de vie de ses compatriotes. À quel problème devrais-je m’attaquer pour rendre plus facile les journées des Ivoiriens ? Voici la question qui trottine dans sa tête. Ses réflexions et ses observations la mènent vers le transport à Abidjan ! Nous savons que l’un des plus grands problèmes d’urbanisation en Côte d’Ivoire et ailleurs en Afrique est la mobilité. Un moyen de transport fiable, rapide, organisé, maîtrisé et peu coûteux aussi bien pour les transporteurs que pour leurs clients, n’est pas toujours évident. Il faut trouver une solution permettant de résoudre ce problème de mobilité, de simplifier les transactions entre chauffeurs et clients, de faciliter l’accès au moyen de transport les plus proches grâce à une application mobile. Pourquoi pas ?

Ses échanges avec Jean-Claude GOUESSE, son ami, lui permettent de préciser ce qu’elle veut faire. Avec lui, elle cofonde Moja Ride. Pour son ami, Stéphanie a des mots précieux : « On ne peut parler de Moja Ride sans mentionner le fondateur et grand visionnaire de cette plateforme révolutionnaire, Jean-Claude GOUESSE. C’est grâce à son dur labeur que la société a vu le jour à Abidjan et c’est un honneur pour moi d’œuvrer à ses côtés dans cette belle aventure. »

Qu’est-ce que c’est que Moja Ride ? C’est un agrégateur de mobilité qui permet aux usagers des transports publics d’avoir accès à tous les modes de transport depuis une seule application mobile.

La mise en place de cette solution s’appuie sur la digitalisation des réseaux de transports dits non conventionnels tels que les ‘’gbakas’’, les ‘’wôrô-wôrô’’ et une interconnection avec les réseaux organisés tels que ceux de la Société des Transports Abidjanais (SOTRA). Ce service nécessite également l’agrégation préalable des moyens de paiement digital en une interface unique pour faciliter les paiements. Ainsi, Moja Ride a commencé à déployer à Abidjan sa plateforme de paiement digital via la Moja Carte des frais de transport dans les ‘’gbakas’’ et les ‘’wôrô-wôrô’’. Stéphanie, son associé et leurs collaborateurs travaillent présentement sur l’agrégation des moyens de paiement Orange Money, MTN money et Moov Money dans leurs applications. « Cette première phase permet de réduire la frustration des usagers avec les problèmes chroniques de petites monnaies mais aussi de sécuriser leur argent contre le vol. » souligne-t-elle. Les données issues du service de paiements permettront à Moja Ride de créer une cartographie des transports urbains non conventionnels, afin de finaliser son service de Mobilité-as-a-Service (MaaS) dans un futur proche. Avec la plateforme MaaS de Moja Ride, l’usager donne juste sa destination et la plateforme coordonne son trajet du départ jusqu’à sa destination.

Permettez-vous de rêver !

Stéphanie prépare peu à peu son retour définitif sur Abidjan. En attendant, elle fait la navette entre cette ville et Washington D.C. chaque trimestre. Elle espère impacter les Jeunes d’Afrique qu’elle aura l’occasion de rencontrer. Ces Jeunes qui, pour la plupart n’ont pas été éduqués à la notion de l’entrepreneuriat.

Aux États-Unis, les choses sont tout autres. « Il y a une différence énorme entre nos deux cultures. Les Américains, dès le bas âge, sont encouragés à travailler à leur propre compte, c’est un mode de vie ancré dans les mœurs de tout le monde. Le concept de travailler pour une entreprise toute une vie est complètement révolu. Par contre en Afrique, l’écosystème entrepreneurial connaît plusieurs difficultés qui ralentissent malheureusement nos Jeunes entrepreneurs. »

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Ces problèmes, elle les a identifiés. D’abord, selon elle, le système éducatif encourage les élèves à se faire embaucher par les grosses boîtes et à y demeurer le plus longtemps possible. « Nos Jeunes ont peur de prendre des risques et d’aller au bout de leurs rêves. » a-t-elle déclaré en substance. Ensuite, elle a évoqué le fait de la complexité du système juridique dans la plupart des pays africains, qui freine la création des PME : « Il n’y a pas de structure mise en place pour célébrer et encourager l’entreprenariat comme en Amérique du nord. C’est vrai qu’on en voit de plus en plus de nos jours et je salue grandement les efforts mis en place à ce sujet. » Enfin, elle a touché du doigt la question du financement : « En matière de financement aux États-Unis et au canada, les banques accordent des prêts aux Jeunes entrepreneurs qui souhaitent démarrer leurs activités. Dans nos pays africains, en particulier, francophones, il est très difficile pour les entrepreneurs d’avoir des prêts ou des marchés. Je trouve cela vraiment déplorable. »

Mais, toutes ces difficultés égrainées ne sont pas à mesure d’empêcher Stéphanie d’être optimiste, de garder espoir et de rêver pour l’Afrique : « Mon plus grand souhait et mon rêve le plus ardent pour l’Afrique, c’est la paix et la stabilité politique. Une Afrique apaisée conduirait à un environnement propice au développement économique et social de la population. Ça nous permettra aussi d’attirer des investisseurs et faciliter l’autosuffisance financière de nos pays. » Déclare-t-elle !

Pour son dernier mot, elle décide de s’adresser à la Jeunesse africaine en ces propos : « Permettez-vous de rêver, d’avoir une vision, un objectif clair et de vous atteler à en faire une réalité. L’amour de la facilité ne peut garantir un succès à long terme, seul le travail bien fait paie. En conclusion, ne laissez jamais un obstacle ou une épreuve définir le reste de votre vie. Servez-vous des épreuves pour vous propulser vers l’avant. »

Demain Sera Meilleur…

 

Yannick DJANHOUN

About Yannick DJANHOUN

Yannick DJANHOUN, aussi appelé Mister Colombo, est un Journaliste ivoirien. Actuellement Rédacteur en Chef de Tomorrow Magazine, Yannick est un passionné de la Jeunesse Africaine. Sa plume, il l'a met au service de la promotion du Leadership de celle-ci.

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